PATRIMOINE ET LEGENDE DE SAINT-DERRIEN
Histoire
C'est probablement la présence de la fontaine sacrée dédiée à Saint-Derrien qui a, au XI è ou au XVI siècle, a suscité la
construction de la chapelle dédiée à ce saint. L'existence de ce lieu de culte évite à la population de se rendre au bourg de
Plounéventer pour suivre la messe. Les habitants de Saint-Derrien étaient dans l'obligation de gagner Plounéventer pour les
baptêmes, mariages et obsèques. Ainsi le baptême d'un bébé né à Kerham ou à Mezanstourm nécessitait donc le jour ou,
plus souvent, le lendemain de la naissance un déplacement d'une quinzaine de km, soit près de quatre heures de route.
C'est en Juillet 1845 que Saint-Derrien est érigée en paroisse. A ce moment, la chapelle devient église paroissiale.
Il faut attendre le 15 Mars 1882 pour que la paroisse de Saint-Derrien soit élevée au rang de commune. Son premier maire
fut Yves Le Bras.
En 1882, avec ses 1011 habitants, la commune de Saint-Derrien était à son maximum démographique.
Comme les autres campagnes de l'est du Léon, le territoire de Saint-Derrien connaît son âge d'or au XVI è siècle et surtout
au XVII è siècle. Cette période se caractérise par un brillant artisanat toilier.
Patrimoine
Il existe de nombreuses traces préhistoriques et historiques.
C’est ainsi qu'un biface (hache en pierre taillée) datant d'il y a environ 500 000 ans a récemment été mis au jour du côté de
Keryvon. De nombreuses haches en pierre polie ont, par ailleurs, été exhumées, notamment à l'occasion de l'arrachage de
pommes de terre. Assez exceptionnelle, l’une d'entre-elles est longue de 30 cm.
Le passé Gaulois est évoqué par la découverte d'une monnaie Osisme frappée à Carhaix, de même que par ses souterrains,
c’est à dire des sortes de caves, signalées aux abords immédiats de Saint-Derrien.
Les vestiges Gallo-romains y sont particulièrement nombreux. La voie romaine Carhaix-Plouguerneau correspond à l'ancien
tracé de la départementale 32.De part et d'autres de cette voie, on recense une dizaine de sites gallo-romains.
Le moulin de Lansolot
Je suis blotti au fond d'une vallée, sur la rivière « la Flèche » qui prend sa source à Bodilis et qui se jette dans la baie de Goulven.
Ancien moulin banal, ma construction daterait des années 1646. Je dépendais d'un manoir situé sur les hauteurs, le manoir
de Kerbrat. Puis j’ai été vendu comme bien national à la Révolution. Plusieurs familles se succédèrent pour me faire
fonctionner soit en tant que propriétaire soit en tant que locataire. Une petite ferme faisait aussi vivre la famille et un four
banal servait à faire cuire le pain pour le voisinage. J'ai toujours fabriqué de la farine de blé ou de sarrasin.
Une roue à aubes fait tourner mes meules qui écrasent froment et blé noir. Le 20ème siècle va me transformer entièrement :
d'abord l'extension du bâtiment principal, puis au début des années 1940, l'installation des deux turbines, moteur et cylindres.
En 1947, je deviens une petite minoterie. En 1968 je fais ma propre révolution. Je refuse le froment pour ne m'occuper que
du blé noir surtout celui du pays dont la farine sert à la confection du plat typiquement Léonard « le KIG HA FARZ » et des
galettes.
Enfin, malgré tous ces changements, le principal pour moi est que je puisse écraser ma mouture en toute sérénité.
De nos jours on peut me visiter et Claude Roussillon(02 98 68 54 43), mon propriétaire actuel, se fera un plaisir de vous guider et de vous présenter tous mes secrets.
La légende de Derrien et Neventer.
Une fois terminé leur pèlerinage en Terre-Sainte, les généreux chevaliers Néventer et Derrien, seigneurs bretons originaires
de la Grande-Bretagne actuelle, prennent le chemin du retour. Après une navigation en Méditerranée et le passage du détroit
de Gibraltar, ils entrent dans l’Océan, longent les côtes d’Espagne et enfin accostent au port de Vannes. C'est de cette ville
qu’ils se rendent à pied à Nantes en pèlerinage honorer les reliques de Saint Pierre. On y venait en pèlerinage de tous les
cantons de Bretagne.
Arrivés à Nantes, ils furent bien reçus tant par le gouverneur militaire que par l’évêque qui les confessa, leur administra les
sacre
ments et leur fournit chevaux et serviteurs pour eux et leur suite. Ainsi voyageraient-ils en toute sécurité jusqu’à Brest où
leurs navires étaient allés les attendre.
Ils faisaient la traversée du pays et longeaient la rivière Dour-doun (1) lorsque leurs regards furent attirés par une scène
étonnante : ils aperçurent entre Pont-Christ et le château de la Roche-Maurice, à deux kilomètres environ de Landerneau, le
seigneur de ce château, Elorn (2), qui, des créneaux de la muraille, se jetait dans la rivière. A cette époque, celle-ci coulait au
pied de cette place-forte.
Depuis lors cette rivière, perdant son ancien nom de Dour-doun, est appelée Elorn. Exactement comme Icare, du fait de sa
prétention à pouvoir voler avait donné son nom à la mer d’Icarie, le malheureux seigneur Elorn, du fait de son désespoir, a
donné son nom à ce cours d’eau.
Nos deux chevaliers se précipitent à toute bride vers la rivière, agrippent Elorn et le tirent hors de l’eau, légèrement blessé.
On le transporte dans sa maison et Néventer lui demande alors la raison pour laquelle il s’était jeté dans la rivière :
«-Seigneurs, dit-il, il y a près d’ici un terrible dragon qui dévore hommes et bêtes. Dès que la faim le fait sortir de sa
tanière, il fait à tout ce pays des dégâts et des dommages irréparables, dévorant aussi bien ses habitants que leurs
troupeaux. Pour empêcher cela, le roi Bistrok a fait un édit : chaque samedi on doit tirer au sort, et celui sur qui il tombe sera
obligé d’envoyer un homme pour être dévoré par cette bête cruelle ou d’y aller lui-même. Or, le sort est si souvent tombé sur
moi que j’y ai envoyé tous les gens de mon entourage et qu’il ne me reste plus que ma femme que voici et ce petit enfant
qu’elle tient dans ses bras. Il n’est âgé seulement que de deux ans. Le sort étant tombé sur lui, j’aime mieux être suffoqué par
les eaux que de le livrer à une mort cruelle ! »
Les deux chevaliers, l’ayant patiemment écouté, le consolèrent et lui dirent que, s’il voulait renoncer à être païen et
embrasser la foi de Jésus-Christ, ils le délivreraient de ce dragon. Car, lui expliquèrent-ils, ce même Jésus-Christ avait promis
que, en son nom, ceux qui croiraient en lui chasseraient et extermineraient les serpents. Puis, après un long éloge de leur
religion, ils terminèrent en rappelant que même le Très-Auguste et Victorieux Empereur Constantin, devant l’excellence de la
religion chrétienne, avait admis que la religion païenne était sans aucune valeur, et s’était fait chrétien. Et, qu’à son exemple,
les princes et les grands seigneurs de sa cour se faisaient baptiser.
Elorn fit la sourde oreille à ces recommandations salutaires et dit qu’il voulait vivre et mourir dans la religion de ses ancêtres.
Mais, poursuivra-t’il cependant, s’ils pouvaient le délivrer de ce serpent, il leur donnerait une de ses terres ou un de ses
domaines, à leur choix.
«-Non, répondit Derrien, nous n’avons que faire de tes biens, promets-nous seulement de construire sur tes terres une
église à notre Dieu où les Chrétiens puissent s’assembler pour célébrer leur culte, et, avec son aide, nous exterminerons le
dragon et en délivrerons tes terres ».
Elorn accepta l’offre et promit qu’il tiendrait parole. De plus, il autorisait non seulement que son fils Riok, âgé seulement de
deux ans, soit instruit dans la religion et la foi de Jésus-Christ, mais aussi tous ceux de sa famille qui le désireraient.
Aussitôt, les deux nobles chevaliers se rendent à la caverne du dragon et, au nom de Jésus-Christ, lui ordonnent de se
montrer. Il sort donc.
Le repaire du serpent à Toul-ar-Sarpant à Saint-Derrien.
Le sifflement épouvanta l’assistance : long de cinq toises (3) le corps gros comme un cheval, la tête faite comme un coq, il ressemblait au basilic !(4) tout couvert d’écailles dures, la gueule si grande que d’une seule bouchée il avalait une brebis, et son œil était si pernicieux que d’un seul regard il tuait les gens. A la vue du serpent, Derrien met pied à terre cependant que, terrifié, son cheval s’enfuit à bride abattue à travers le pays ! Derrien s’avance vers le dragon, fait le signe de la Croix et lui passe son écharpe autour du cou (5). Ensuite il confie la bête à l’enfant Riok qui la mènera jusqu’au château de son père. Le père, émerveillé, remercia les chevaliers et les conduits à Brest où ils arrivèrent avec le dragon, devant le roi Bristok stupéfait !
De Brest, Derrien et Neventer se rendirent à Tolente, alors ville riche, voir le prince Jugon, père de Jubalt que Conan Mériadec vaincra plus tard. Et, enfin, ils prirent le chemin du port de Poullbeunzual pour embarquer sur leurs navires qui y étaient à l’ancre. C’est à cet endroit qu’ils commandèrent au dragon de se jeter dans la mer. Et le dragon leur obéit.
Depuis cet évènement mémorable ce port se nomme Poullbeuzaneval, c’est-à-dire « port où fut noyée la bête », que les Bretons appellent par contraction Pontusval, en la paroisse de Plounéour-Trez, dans le Léon.
(1) Dour-doun: mot-à-mot "eau profonde". Dour a aussi le sens de "cours d'eau", et "douric" de petit cours d'eau. L'orthographe actuelle de "doun" est "don". Une association de Landerneau porte aujourd'hui ce nom de "Dourdon".
(2) Le seigneur de Traon Elorn ( traoñ: val ) apparait aux réformations et montres de 1481 à 1534 et blasonnait: "échiqueté d'or et de gueules de six tirés (3) Près de 10 mètres, la toise équivalant à 1,949 mètre.
(4) Basilic: "Reptile fabuleux, qui tue par son seul regard ou sa seule haleine celui qui l'approche sans l'avoir vu et ne l'a pas regardé le premier.../...Le seul moyen pour le tuer, consistait à lui tendre un miroir". Jean Chevalier-Alain Geerbrant. Dictionnaire des symboles.
(5) L'écharpe des chevaliers et gens de guerre en général servait à distinguer les différents camps ou les différents partis. Elle se portait en bandoulière ou en ceinture.
Le lien avec le site suivant peut vous permettre d’en savoir plus sur le patrimoine présent sur notre commune :